Communiqué de presse
Leçons tirées de la riposte au VIH : l’ONUSIDA avertit des dangers liés au non-respect des droits humains au cours de la riposte à la COVID-19
27 août 202027 août 2020Le rapport révèle des interruptions de services liés au VIH, des cas de violence, de harcèlem
Le rapport révèle des interruptions de services liés au VIH, des cas de violence, de harcèlement, d’agression, d’abus et des décès, ainsi que l’incapacité de nombreux gouvernements à respecter les droits humains aux premières heures de leur riposte à la pandémie. L’ONUSIDA enjoint aux gouvernements de protéger les plus vulnérables, en particulier les populations clés exposés à un risque élevé de contamination au VIH
GENÈVE, le 27 août 2020—Au cours des premières étapes de la riposte à la COVID-19, l’ONUSIDA a reçu de nombreux témoignages portant sur des interruptions de services liés au VIH et sur des violations préoccupantes des droits humains à l’encontre de populations marginalisées et vulnérables. L’expérience tirée de la riposte au VIH a montré que les violations des droits humains au cours d’une pandémie nourrissent la défiance, nuisent aux personnes et entravent les ripostes de santé publique.
Le Secrétaire général des Nations Unies a demandé à toutes les entités des Nations Unies d'apporter leur soutien dans leur domaine aux efforts de l'Organisation mondiale de la Santé. Ainsi, afin d'apporter des informations destinées au futur de la riposte, l’ONUSIDA a mandaté un rapport décrivant l’impact des mesures de santé publique et des restrictions de mouvement consécutives à la COVID-19, sur les droits humains. Ce document doit également permettre de puiser dans les leçons apprises de la riposte au sida. Les conclusions sont révélatrices de tendances que l’on retrouve dans le monde entier. Elles mettent à jour des violations considérables des droits humains, des perturbations dans les services de santé et sociaux mettant la vie de personnes en danger, ainsi que des violences, des abus et des discriminations visant les populations clés, marginalisées et pauvres.
L'objectif de ce rapport est d'aider les gouvernements à prendre des mesures positives pour répondre aux problèmes liés aux droits humains dans le contexte mouvant de la COVID-19. « L’existence d’un compromis entre les droits humains et la santé publique est un mythe », a déclaré Winnie Byanyima, directrice exécutive de l’ONUSIDA. « Les droits humains sont non seulement intrinsèques, mais ils forment le levier par excellence permettant aux gouvernements de mettre un terme à la pandémie. »
Le rapport Droits en cas de pandémie — Confinements, droits et leçons du VIH dans la réponse précoce à la COVID-19 dresse un état des lieux. Il se concentre sur les premiers instants de la pandémie, entre février et mi-mai 2020, et il attire l’attention sur les expériences vécues par certaines des communautés les plus marginalisées et vulnérables. Ces violations se sont par exemple traduites par l’usage de balles en caoutchouc, de gaz lacrymogène et de fouets par la police pour faire respecter l’éloignement social, ou encore par des arrestations, la détention et des amendes pour non-respect du port du masque. Les personnes qui n’avaient les moyens de payer l’amende ont été gardées plus longtemps en prison que celles pouvant s’en acquitter.
Le rapport mentionne également l’arrestation et la détention de médecins qui allaient ou revenaient d’un établissement de santé. Nous avons également reçu des témoignages sur des femmes enceintes mortes de ne pas avoir eu accès aux services de santé à cause de restrictions strictes de déplacement. Certaines d’entre elles ont succombé en allant à pied à l’hôpital. Un témoignage porte sur un chauffeur de mototaxi battu à mort par la police alors qu’il emmenait à l’hôpital pendant le couvre-feu une femme en train d’accoucher.
Le rapport Rights in a pandemic met en avant 10 domaines d’action immédiate destinés aux gouvernements afin de riposter efficacement à la COVID-19 tout en respectant les droits humains. Cela passe par l’adoption de mesures proactives pour garantir l’accès des personnes, en particulier les membres de groupes vulnérables, aux services de prévention et de traitement du VIH ; par la nomination d’acteurs incontournables, y compris les organisations dirigées par une communauté, et en leur apportant un soutien ; et par la mise en place de mesures préventives et de lutte contre les violences basées sur le genre.
« Ce rapport arrive à un moment difficile », a indiqué Felicita Hikuam, directrice de l’AIDS and Rights Alliance for Southern Africa. « Il semble malheureusement que nous n’avons pas retenu la leçon que le VIH essaie de nous apprendre : les épidémies révèlent et exacerbent les inégalités existantes et touchent le plus durement les populations déjà marginalisées. »
La sécurité en période de confinement est une préoccupation majeure, en particulier pour les personnes les plus touchées par le VIH, y compris les femmes et les filles, les enfants et les populations clés, notamment les travailleurs et travailleuses du sexe et la population LGBTI (lesbienne, gay, bisexuelle, transgenre et intersexuée). Dans de nombreux pays, on a signalé une augmentation de 40 à 70 % des violences basées sur le genre, avec des pics encore plus importants dans certaines villes et régions. Des personnes transgenres ont été victimes de harcèlement et d’arrestations pour être sorties de chez elles le « mauvais jour » là où le sexe des individus jouait un rôle dans les mesures de confinement. Les travailleuses et travailleurs du sexe ont vu leurs revenus reculer et ne sont souvent pas éligibles aux aides financières. L’ONUSIDA répète inlassablement que les violences envers les populations clés, les femmes et les filles augmentent la vulnérabilité au VIH.
« Le rapport fait apparaître celles et ceux d’entre nous que l’on repousse aux marges de la société dans le cadre de cette pandémie », a souligné Elena Reynaga, secrétaire exécutive du Réseau des travailleuses du sexe d’Amérique latine et des Caraïbes. « Du point de vue des droits humains, nous avons besoin que les gouvernements écoutent et mettent en œuvre ces recommandations qui forment une étape importante pour mettre fin au sida à l’horizon 2030 sans oublier personne. »
Au mois de mai dernier, l’ONUSIDA a attiré l’attention sur le risque de perturbations de l’accès aux services du VIH au cours de la pandémie de COVID-19. Très tôt, des simulations ont montré qu’une perturbation majeure de l’accès au traitement du VIH pourrait se solder par 500 000 morts supplémentaires liées au sida en Afrique subsaharienne. Ce nouveau rapport montre que les services de prévention et de traitement du VIH ont été perturbés dans 10 des 16 pays étudiés. Des pays signalent dans certaines zones un recul allant jusqu’à 20 % de la collecte des médicaments. Il a été signalé à plusieurs reprises que des personnes vivant avec le VIH n’avaient pas assez d’antirétroviraux pour traverser un confinement de plus de 60 jours et que d’autres ont arrêté leur traitement par manque de nourriture.
La riposte au VIH est riche en enseignements, mais la crise actuelle ne doit pas faire oublier l'autre pandémie. « Les communautés de personnes vivant avec le VIH et affectées par le virus se trouvent à nouveau confrontées au double fléau de l’injustice et des discriminations ciblées nées de la pandémie de COVID-19 », a déclaré Rico Gustav, directeur exécutif de GNP+. « Nous sommes un réseau mondial des personnes vivant avec le VIH et nous demandons une application de la loi reposant sur les droits humains. Elle doit reconnaître que les communautés marginalisées ont besoin de se déplacer librement pour aller chercher des médicaments contre le VIH et d’autres pathologies, mais aussi que la délivrance d’ordonnances pour plusieurs mois d’antirétroviraux contre le VIH est nécessaire. »
Mais tout n’est pas négatif. Sur les 16 pays étudiés, 15 gouvernements ont libéré des personnes incarcérées afin de réduire la surpopulation carcérale et d’endiguer la transmission de la COVID-19. Là où les gouvernements ont coopéré avec la société civile et le secteur privé, les ripostes à la COVID-19 ont été plus positives et inclusives. Dans certains pays, un transport gratuit a été mis en place pour permettre à la population de recevoir des soins médicaux d’urgence pendant le couvre-feu et dans d’autres, la police a distribué des masques plutôt que des amendes. Certains pays ont fourni un refuge temporaire aux personnes sans abri et de la nourriture aux personnes vivant dans des camps de déplacé-es. D’autres ont déclaré qu’il était interdit de couper l’eau à cause de factures impayées et ont imposé un moratoire sur les expulsions ou investi massivement dans l’aide alimentaire.
« Les institutions nationales des droits humains comme celle que je dirige jouent un rôle essentiel pour surveiller et protéger les droits humains de toutes et tous, aussi bien des populations vulnérables que nanties, et en particulier en temps de crise et de pandémie telles que la COVID-19 et le VIH », a déclaré Anthony O. Ojukwu, secrétaire exécutif de la National Human Rights Commission of Nigeria. « Ce rapport nous ouvre la voie pour travailler avec des institutions du monde entier afin de renforcer les contre-pouvoirs en place dans nos pays respectifs en vue de corriger les excès comme ceux commis par des forces de l’ordre au début du confinement. »
L’ONUSIDA a également reçu des témoignages de pays allongeant à 3 ou 6 mois la durée des ordonnances d’antirétroviraux ou encore proposant des livraisons de médicaments à domicile ou organisées par les communautés.
« L’ONUSIDA salue les mesures positives qui ont été prises. Mais nous devons nous attendre à ce que la COVID reste une réalité pendant longtemps », a ajouté Mme Byanyima. « L’un de nos engagements consiste à défendre les plus vulnérables, même dans la situation difficile héritée de la COVID-19. Nous allons utiliser ce rapport pour réunir les gouvernements, les communautés et les partenaires afin d’établir un dialogue et de trouver un moyen de réformer des lois, des règles et des pratiques néfastes en vue de protéger les droits humains. »
Le rapport repose sur le document Les droits humains aux temps du COVID-19 publié par l’ONUSIDA en mars 2020. Ce dernier enjoignait aux pays d’adopter une approche respectant les droits humains dans leur riposte à la COVID-19 en prenant en compte les bonnes pratiques nées de 40 ans de lutte contre le VIH.
ONUSIDA
Le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) guide et mobilise la communauté internationale en vue de concrétiser sa vision commune : « Zéro nouvelle infection à VIH. Zéro discrimination. Zéro décès lié au sida. » L’ONUSIDA conjugue les efforts de 11 institutions des Nations Unies – le HCR, l’UNICEF, le PAM, le PNUD, l’UNFPA, l’UNODC, ONU Femmes, l’OIT, l’UNESCO, l’OMS et la Banque mondiale. Il collabore étroitement avec des partenaires mondiaux et nationaux pour mettre un terme à l’épidémie de sida à l’horizon 2030 dans le cadre des Objectifs de développement durable. Pour en savoir plus, consultez le site unaids.org, et suivez-nous sur Facebook, Twitter, Instagram et YouTube.
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