Reportage

Paiement d’allocations en espèces et sans condition aux ménages marginalisés pendant la pandémie de la COVID-19

29 octobre 2021

La COVID-19 a mis en avant la nécessité cruciale d’ajouter aux ripostes à la pandémie des mesures de protection sociale qui atteignent et profitent aux populations marginalisées.

Lorsque la pandémie a touché l’Afrique occidentale et centrale début 2020, la région était déjà confrontée à de graves difficultés socio-économiques et aux crises humanitaires. Les restrictions sociales imposées pour la contenir ont exacerbé ces problèmes. Les populations pauvres et vulnérables, y compris les personnes vivant avec le VIH et les populations clés, ont été durement touchées.  

Entre juin et août 2020, avec l’aide de l’ONUSIDA et en partenariat avec le Réseau africain des personnes vivant avec le VIH en Afrique de l’Ouest, des études menées dans 17 pays de la région sur la situation et les besoins des personnes séropositives ont révélé que jusqu’à 80 % des personnes vivant avec le VIH avaient perdu leurs moyens de subsistance et que plus de 50 % d’entre elles avaient besoin d’une aide financière et/ou alimentaire.  

En juillet 2020, les résultats de l’étude ont poussé l’ONUSIDA et le Programme alimentaire mondial (PAM) à lancer un projet pilote sur des allocations en espèces et sans condition en vue d’aider les personnes vivant avec le VIH et les populations clés à faire face à l’impact socio-économique du VIH et de la COVID-19 dans quatre pays prioritaires : le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire et le Niger. L’initiative a été conçue pour tirer parti des accords existants du PAM avec les prestataires de services, mais aussi de l’engagement de la communauté de l’ONUSIDA, ainsi que des relations avec les réseaux de la société civile dans les quatre pays prioritaires.

Les allocations en espèces sont de plus en plus reconnues comme une forme efficace de protection sociale ayant un effet social et économique positif. Elles apportent un supplément de revenu, ce qui évite aux ménages la vente des biens essentiels ou la déscolarisation de leurs enfants, avec des effets multiplicateurs sur les économies locales. Elles constituaient 40 % environ des dépenses nettes de sécurité sociale dans le monde en 2018, mais moins de 20 % en Afrique occidentale et centrale.

Alors que la pandémie se propageait dans cette région, seuls quelques pays (dont la Côte d’Ivoire et le Sénégal) ont accordé un soutien supplémentaire aux ménages vulnérables sous la forme d’allocations en espèces ou d’aides sociales.

L’objectif immédiat du projet pilote était de faire bénéficier environ 5 000 foyers d’allocations uniques en espèces et sans condition, allant de 88 USD par bénéficiaire (en Côte d’Ivoire) à 136 USD (au Cameroun).

« Je suis très reconnaissance pour cette aide. Je l’ai utilisée pour payer ma formation en couture et pour acheter une machine à coudre afin de lancer ma propre activité. J’ai également pu aider ma mère qui a perdu son emploi en raison de la pandémie », a déclaré une jeune femme vivant avec le VIH au Cameroun.

Des organisations de la société civile et des prestataires de services financiers ont été engagés lors de la planification du projet pilote. L’éligibilité aux transferts a été décidée sur la base de divers critères de vulnérabilité, et les allocataires ont été identifié-es avec le soutien d’organisations communautaires. Des étapes supplémentaires ont consisté à sensibiliser les bénéficiaires, à distribuer les allocations en espèces, à résoudre les problèmes du processus et à assurer son suivi. Une attention particulière a été portée à la confidentialité et à la réduction de potentielles stigmatisations des bénéficiaires.

Dans les quatre pays, près de 4 000 bénéficiaires ont reçu une allocation et on estime qu’environ 19 000 autres membres du foyer ont également bénéficié des transferts d’argent. Ces allocations ont été en majorité consacrées à l’alimentation, aux soins de santé, à l’éducation et au logement, ou à des activités génératrices de revenus. Les expériences des pays varient en fonction du degré d’implication des partenaires communautaires et de l’engagement des acteurs gouvernementaux.  

Le projet pilote a montré qu’il est possible de fournir rapidement des aides en espèces aux personnes marginalisées vivant avec le VIH et aux populations clés dans des circonstances très difficiles et que ce type d’aide représente un soutien d’urgence précieux.   

Les enseignements tirés du projet incluent la nécessité d’élaborer des approches inclusives et flexibles, de travailler de manière claire et transparente pour les partenaires communautaires et d’impliquer systématiquement les partenaires communautaires tout au long du processus. La définition de critères d’éligibilité clairs et impartiaux, leur application cohérente et la sensibilisation des bénéficiaires et des communautés sont également primordiales.

Le renforcement des capacités et d’autres aides (y compris financières) pour les partenaires communautaires sont tout aussi fondamentaux. Les organisations communautaires, les équipes-conseils reconnues, ainsi que les pairs-éducateur-rices étaient essentiels pour établir la confiance, identifier et atteindre les bénéficiaires visés, minimiser la stigmatisation et évaluer l’impact des transferts d’argent. S’engager avec les structures gouvernementales dès le début du projet permet de créer le potentiel pour des améliorations durables.  

Les allocations uniques en espèce de ce type peuvent aider les ménages à résister aux chocs à court terme, mais elles ne suppriment pas la nécessité d’intégrer entièrement les populations vulnérables et marginalisées dans les ripostes aux crises et les systèmes complets de protection sociale. Il est impératif que les pays d’Afrique déploient dans leur population une protection sociale inclusive et polyvalente qui soit accessible et durable. Le processus exige aussi de mettre plus d’accent sur les personnes dans le cadre d’allocations en espèce et de les intégrer dans d’autres formes de prestations sociales et d’assistance qui ne sont pas nécessairement basées sur l’argent en espèces, par exemple la gratuité ou la subvention des soins de santé primaires, l’éducation, l’eau et l’énergie.

À la suite de cette expérience pilote sur l’utilisation des transferts d’argent pour soutenir les personnes les plus vulnérables vivant avec le VIH et les populations clés, l’ONUSIDA et le Civil Society Institute for Health ont renforcé leur collaboration sur la promotion d’une protection sociale inclusive prenant en compte le VIH en Afrique occidentale et centrale. Récemment, ils ont organisé, avec le financement de LUXDEV et en collaboration avec plusieurs coparrainants de l’ONUSIDA, un atelier de renforcement des capacités afin de mobiliser et de renforcer les capacités de la société civile et des communautés. L’atelier visait aussi à promouvoir le dialogue et la collaboration entre les organisations de la société civile, les partenaires et les gouvernements en vue de faire avancer la protection sociale inclusive et prenant en compte le VIH dans la région.

Sur la base des recommandations de l’atelier, un certain nombre d’activités de suivi ont été convenues pour améliorer le rôle et le positionnement des communautés dans l’expansion de la protection sociale sensible au VIH dans leurs pays et leur région. 

« Au Niger, les allocations en espèces sont arrivées au bon moment. Elles ont été utilisées par les bénéficiaires pour faire des réserves de nourriture et payer leur loyer, mais surtout pour permettre aux enfants de poursuivre leur scolarité. Cette initiative a démontré la valeur et l’importance de collaborer avec les communautés et nos coparrainants pour atteindre un objectif commun », a déclaré El Hadj Fah, directeur pays de l’ONUSIDA pour le Niger.

Coparrainants de l'ONUSIDA

Programme alimentaire mondial

Sommet régional sur le VIH

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