Déclaration à la presse
Journée zéro discrimination : il est urgent de décriminaliser pour sauver des vies
28 février 202328 février 2023À l’occasion de la Journée zéro discrimination 2023 organisée le 1er mars, l’ONUSIDA soulign
À l’occasion de la Journée zéro discrimination 2023 organisée le 1er mars, l’ONUSIDA souligne la nécessité de supprimer les lois qui criminalisent les personnes vivant avec le VIH et les populations clés.* Le thème de cette année, « Sauvons des vies : décriminalisons », met en avant l’impact positif sur la santé et l’existence des personnes lorsque les lois discriminatoires et punitives sont supprimées.
En 2021, l’humanité s’est fixé des objectifs ambitieux pour réformer les lois afin de supprimer les dispositions pénales qui nuisent à la riposte au VIH et laissent les populations clés de côté. Reconnaissant que la décriminalisation est un élément essentiel de la riposte, les pays se sont engagés à ce qu’à l’horizon 2025 moins de 10 % des pays aient des cadres juridiques et politiques punitifs qui affectent la riposte au VIH.
La directrice exécutive de l’ONUSIDA, Winnie Byanyima, a déclaré :
« Les lois qui criminalisent entravent l’accès à un traitement vital. Elles doivent être supprimées. Les inégalités sociales résultats de normes sociétales, d’absence d’opportunités à l’école, etc. sont la seule raison pour laquelle des personnes meurent encore du sida. Tous ces éléments s'agrègent pour accroître leur vulnérabilité. »
« Au niveau national, il est essentiel d’abroger les lois pénales qui éloignent de la prévention et du traitement du VIH. »
Ces objectifs sont ambitieux, mais nécessaires
Une étude menée en Afrique subsaharienne montre que la prévalence du VIH chez les gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes est cinq fois plus élevée dans les pays qui criminalisent les rapports sexuels entre personnes du même sexe que dans les pays qui ne les criminalisent pas. Par ailleurs, elle est 12 fois plus élevée dans les pays où des poursuites judiciaires à l’encontre de cette population ont récemment été engagées.
La criminalisation du commerce du sexe augmente à la fois le risque d’infection au VIH pour les travailleurs et travailleuses du sexe ainsi que leur vulnérabilité face aux agressions perpétrées par leur clientèle, les forces de l’ordre et d’autres personnes. Il a également été démontré à plusieurs reprises que la criminalisation de la clientèle nuit à la sécurité et à la santé des travailleurs et travailleuses du sexe, notamment en réduisant l’accès au préservatif et à son utilisation et en augmentant les cas de violences.
La dépénalisation de la consommation et de la détention de drogues pour un usage personnel s’accompagne d’une baisse significative de l’incidence du VIH chez les consommateurs et consommatrices de drogues injectables, y compris en permettant un meilleur accès aux services de réduction des risques, ainsi que d'une diminution des violences, des arrestations ou du harcèlement par les forces de l’ordre.
Et Mme Byanyima de poursuivre :
« Nous avons la preuve que l’abrogation des lois pénales condamnant les relations homosexuelles réduit considérablement le risque de contracter le VIH chez les gays et les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes.
Pour moi, le VIH est une maladie, mais c’est avant tout une injustice sociale. Il se nourrit des inégalités de la société. Ces dernières ne peuvent se produire qu'avec un consensus dans la société. Nous avons donc besoin de rallier tout le monde à cette cause. »
Il est par conséquent essentiel de réformer les lois si nous voulons mettre fin au sida comme menace de santé publique d’ici 2030.
Les objectifs sont ambitieux, mais pas inaccessibles
En effet, des expériences récentes nous montrent bien qu’ils sont atteignables. En 2022, la Belgique et l’Australie ont supprimé des lois criminalisant le travail du sexe, le Zimbabwe a dépénalisé l’exposition et la transmission du VIH, ainsi que la non-divulgation du statut sérologique et la République centrafricaine a réduit le champ d’application de ses lois pénales relatives au VIH. Par ailleurs, Antigue-et-Barbude, Saint-Christophe-et-Niévès, Singapour et la Barbade ont abrogé d’anciennes lois datant de l’ère coloniale qui criminalisaient les relations sexuelles entre personnes du même sexe. Le Koweït a abrogé une loi criminalisant l’imitation du sexe opposé, une loi utilisée pour cibler les personnes transgenres tandis que la Nouvelle-Zélande a supprimé les restrictions de déplacement liées au VIH.
Cependant, en dépit de réformes aussi encourageantes, l’humanité n’est pas en bonne voie pour garantir que moins de 10 % des pays maintiennent un environnement juridique et politique punitif freinant l’accès aux services anti-VIH. En 2021, selon les chiffres de l’ONUSIDA, 134 pays criminalisaient explicitement l’exposition au VIH, sa transmission ou la non-divulgation du statut sérologique ou faisaient encourir des poursuites dans ces cas, 20 pays criminalisaient ou poursuivaient en justice les personnes transgenres, 153 pays criminalisaient au moins un aspect du travail du sexe et 67 pays criminalisent aujourd’hui encore les rapports sexuels consentis entre personnes du même sexe. Par ailleurs, 48 pays imposent encore des restrictions à l’entrée sur leur territoire pour les personnes séropositives, tandis que 53 pays indiquent exiger un dépistage du VIH, par exemple avant d’établir un acte de mariage ou pour autoriser l’exercice de certaines professions. 106 pays déclarent que le consentement des parents est obligatoire pour que les ados puissent faire un dépistage du VIH.
Ces lois et sanctions violent les normes internationales en matière de droits humains et stigmatisent et discriminent des populations déjà marginalisées.
La décriminalisation sauve des vies et contribue à accomplir des progrès en vue de mettre fin à la pandémie de sida.
* Les populations clés sont les communautés les plus exposées au risque d’infection à VIH. Il s’agit notamment des gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, des toxicomanes, des travailleurs et travailleuses du sexe, des personnes transgenres et des personnes incarcérées et vivant dans d’autres milieux fermés.